Notre marche pour la vraie liberté

Nuits courtes

Rêves troublés

Pensées vagues  

Bow, Bow, Bow et tombent nos compagnons de marche, tant de sang qui coule

Cauchemar quand les noms de ces villes chuintent à nos oreilles :

Aguel’hoc, Ogossagou, Sangha, Dinangourou, Sinda, Bankass, Baye, Ouonkoro, Farabougou, Conakry, Dabou, Lagos……

Et s’élève encore cette voix, des cris à Rama, des pleurs et de grandes lamentations : Rachel pleure encore et encore ses enfants

Matés, fusillés, abattus ils sont des victimes, des innocents, les martyrs, nos compagnons de marche, notre marche pour la vraie liberté.

Victime de l’indignité de l’autre, victime de l’avidité politique de l’autre,

L’autre qui s’auto-proclame Monarque jamais remplaçable, le président à vie, le promoteur de la démocratie au bout du canon, celui qui dit « C’est moi, ou le chao »

Ceux qui prennent en otage des peuples fatigués d’un jeu électoral qu’ils n’arrivent pas toujours à comprendre, qui fond de la démocratie un jeu de calcul d’éternels présidents.

Face à la léthargie de leur peuple, certains n’hésitent même plus à clamer haut et fort que sans eux, c’est la catastrophe ; qu’ils sont le changement.

Alors à la place des voix électorales, s’élèvent les voix des plus forts,

Des dictateurs avec les mêmes discours calculateurs. Prétendant faire mieux que leurs victimes ou promettant de faire mieux que la dernière fois, ils finissent par commettre les mêmes bêtises.

Pareil à des tares sur l’aire de leur nation, ils s’érigent eux-mêmes en gouvernants méprisant leurs sujets, ne se mêlant jamais à eux, hormis pour vider leurs bourses ou pour les exploiter à leur profit selon les termes de Thomas More, ne sachant gouverner qu’en enlevant aux citoyens la subsistance et les commodités de la vie.

Et à l’autre de me répondre, : « Mais vous êtes habitué, c’est normal non ! »

Non, non, cela n’est pas normal ! Nous y habituer, s’accommoder, et s’accommoder, c’est vivre resigné, et voir la mort de nos compagnons de marche devenir banale, ordinaire…

Cher Fils,

Comment ne pas affronter cette terrible et longue marche qui s’offre comme l’unique alternative ? Alors, Fils, si dans cette marche je reste, si dans cette marche l’obscurité l’emporte sur ma pensée, si l’absurde nous engloutit, alors je souhaite que cette marche battît la véritable liberté pour toi et tes compagnons de marche…

                                                                                                      Joseph

Mali, de la marche, de l’espoir

Mali, de la marche, de l’espoir

Long et ardu le chemin, dure cette marche ! Mais que pourrait donc m’arrêter, que sauraient donc nous en empêcher ? Qui pourra donc me fermer le chemin, nous détourner de cette grande et dure marche. Puisqu’on fond, l’espoir nous meuve

Le vent est, certes fort, la marée est sans doute en colère…

Mais la lampe, la petite lampe ne s’étend point : l’Esperance

N’est-ce pas de la p-o-l-i-t-i-q-u-e ? De politiciens ?

Eux qui savent dire beaucoup de choses sans acception rien…

Qui confabulent beaucoup mais, ni écoutent ni entendent…

Ceux dont le « jeu » tue consciemment l’innocent, celui qui ne demandait qu’à vivre…

Le grenier du pauvre est vidé, le troupeau réquisitionné.

Démagogie, disent oui le matin, non en milieu du jour et finalement rien quand arrive le soir : confusion, trahison, vide…

Le vent est, certes herculéen, la marée est sans doute en brûlure, le soleil raide…mais contre tout et malgré tout, nait l’espoir, l’Esperance

Celui d’un demain, d’un lendemain, mieux d’un aujourd’hui meilleur…

L’espoir que demain, au Mali, disparaitra l’assise des malheureux et frustrés spectateurs, les « sans opportunités »

Que le matin, je ne suis pas rejeté par ce que je Bwa, Peulh ou Dogon, Senoufo…, parce que je suis femme ou homme, parce que je suis ou ne suis pas ceci ou cela.

Plus vigoureux, l’espoir qu’en milieu de journée, il ou elle ne sera froidement assassiné (e) dans son Champ de maïs…

Qu’en fin de journée il ou elle ne sera poursuivi (e) et tué derrière son troupeau…

C’est l’Esperance d’un aujourd’hui différent :

D’une histoire différente pour mon enfant, pour nos enfants, pour le Mali

L’Esperance de la sécurité perdue retrouvée.

L’Esperance du retour, de la co-construction d’un vivre ensemble paisible.

Les ennemis, mêmes invisibles sont sans doute forts, l’hostilité est sans doute menaçante,

Le temps,

La fatigue,

L’âge,

L’attente,

Mais l’espoir nous meut,  

L’Esperance d’un Mali, de notre Mali nouveau, construit par nous,

La marche, dure et longue, se fera ! La marche de l’Esperance

Esperance …

Joseph

Mali, l’autre marche

Mali, l’autre marche,

La longue et dure marche ! C’est notre marche ! Mais qu’il est long ce chemin, qu’elle est ardue cette voie ! La marche de ce matin, est la marche pour libérer le système prisonnier de la corruption. Ce chemin, « O Caminho », cette marche est la nôtre, c’est notre marche, car c’est notre vie, celle de nos enfants, celle de mon fils. Cette longue et pénible marche est la marche de nous, nous les frustrés, les révoltés, les « sans opportunités ». Notre marche pour reprendre ce dont nous prive la corruption. Parce qu’au Mali l’implacable corruption s’est emparée de tous nos droits, il a pris le cœur du système. Parce que son omniprésence est un mur entre nous et notre place, la place qui nous revient de droit.Ma mère le savait déjà quand j’entreprenais ce long et laborieux chemin de l’école en 1990.  Elle le savait, car je l’ai entendu dire à la voisine : « il y apprendra à écrire et à lire son nom. Du travail plus tard ? Dans ce Mali ? C’est sans espoir ! » Car, pour avoir sa place, du travail dans ce pays il faut être la fille ou le fils de tel. Il faut être de la descendance de tel, il faut avoir de l’argent ou le pouvoir pour avoir une place, ou pour être placé. Sinon, tôt ou tard, tu rejoindras la patrie des frustrés, des « sans opportunités ». En passant, je n’oublie pas le petit, très petit nombre des chanceux qui passent de justesse par les mailles du filet. Je les félicite, je félicite leur courage, leur longue et laborieuse marche, leur persévérance.

Oui, ma mère le savait déjà : « Ça suffira s’il sait écrire et lire son nom ». Tu sais Maman, ton petit fils va déjà au Préscolaire. Il vient d’avoir trois ans. Il sait déjà faire tant de choses, manipuler tant d’objets, il sait dire tant de choses ! Et les choses n’ont pas changé.  Mais j’ai commencé une marche, une longue marche. Je vais me battre pour lui. C’est le but de ma marche, de cette longue et dure marche que je fais avec les autres, qui y croient, qui le veulent. Je marcherais pour que son histoire soit différente. Je marcherai pour qu’il soit toujours à place, la place qu’il veut, qu’il choisira, qu’il fasse ce qu’il faire, qu’il choisisse d’être ce qu’il veut être. Quand il grandira, personne ne lui donne ou lui refuse sa place, son droit, parce qu’il est noir ou blanc, parce qu’il est homme ou femme, parce qu’il est ou n’est pas fils de tel. Telle est la fin de cette longue, longue et dure marche vers la liberté, notre liberté, « a nossa liberdade ».

Joseph

Chez moi, au Mali,

Chez moi, au Mali,

Les jours arrivent et passent. Les évènements se suivent, se succèdent. Dans notre cas au Mali, la succession des évènements nous enfonce dans le désespoir.  Chaque évènement, chaque Coup d’Etat vient avec ses promesses, suscitent des espoirs pour certains, beaucoup de doute pour d’autres, enfonce la majorité dans la pauvreté, la misère. Entre dans le même processus de dégénération : mauvaise gouvernance, mensonge, démagogie, la corruption, l’opportunisme. Le petit Clan au pouvoir s’enrichit, se donne tous les pouvoirs, tous les droits. Et nous, nous sommes toujours plus pauvres : nous n’avons pas d’eau potable, nous n’avons pas d’électricité. La faim tue autant que le Covid19, l’ignorance conduit à la mort beaucoup de personnes, tous les jours. Nos enfants restent à la maison, sinon vont à l’école mais apprennent rien. Dans ce grand flou, comment faire vivre l’espoir, comment être optimiste. Un chao est-il différent d’un autre ? Aujourd’hui beaucoup de maliens applaudissent, soutiennent les militaires, auteurs du Coup du 18 Aout 2020. Beaucoup croient au renouveau. Pour beaucoup les choses seront différentes. Le pays « sera remis sur les rails », pensent-ils ? Pour ma part, je vais continuer à suivre, à observer, a défaut…Longue, longue marche vers…

Joseph